Un mini-T.G.V. sur la voie
BOURGOIN-JALLIEU. Pour réduire la durée du trajet entre Lyon et Grenoble, la S.N.C.F. veut construire une nouvelle voie ferrée qui contournera Bourgoin-Jallieu par le sud et entraînera le percement d'un tunnel sous les collines de Domarin, Maubec et Meyrié. Ainsi que la destruction de plusieurs habitations
C'est une véritable bombe à retardement que vient d'adresser la S.N.C.F., sous couvert de la Mission T.G.V. Lyon-Turin, aux maires des communes situées de part et d'autre de la ligne Lyon-Grenoble. Et ceux-ci disposent de moins d'un mois pour faire connaître, à la préfecture, la position de leur conseil municipal.
Mais si les élus, pour la plupart, seront d'accord sur le principe de réduire d'une vingtaine de minutes la durée du trajet ferroviaire entre Lyon et Grenoble, leur unanimité sera moindre quant à la manière d'y parvenir. En effet, le gain de temps souhaité par la S.N.C.F. nécessite la mise en oeuvre de trains susceptibles de rouler à 220 km/h. Ce que les infrastructures actuelles ne permettent pas, notamment en raison de courbes relativement serrées. Situation qui, conjuguée avec le profil de la voie (vers Saint-André-le-Gaz, la pente atteint 2%), limite entre 120 et 160 km/h la vitesse des trains les plus rapides. Seuls d'importants aménagements des voies existantes ou la construction de nouvelles infrastructures permettraient de faire rouler à 220 km/h des trains entre Lyon et Grenoble. C'est ce dernier schéma qu'a retenu la S.N.C.F.
Si des aménagements permettant aux trains de circuler à 220 à l'heure sont prévus sur 16 kilomètres entre Vénissieux et Heyrieux ainsi que sur les 7 kilomètres qui séparent Saint-Quentin-Fallavier et l'Isle-d'Abeau (d'un coût estimé à 370 millions de francs), le projet comporte la création de deux lignes nouvelles : l'une pour contourner Bourgoin-Jallieu par le sud,l'autre entre Sérézin de la Tour et le Grand-Lemps. Le contournement de l'agglomération berjallienne (à partir de Saint-Alban de Roche) aura une longueur de 12,6 kilomètres. "Il imposera le percement de deux tunnels (l'un de 4 650 m dans la colline supportant Domarin et Maubec, l'autre de 2 050 m dans la colline supportant Meyrié) et d'une tranchée couverte de 540 m avant de retrouver la voie actuelle à Sérézin-de-la-Tour" précise l'étude qui souligne également "de très fortes contraintes d'habitat". Plusieurs constructions dont un hôtel-restaurant seraient touchées au Sennet de Saint-Alban-de-Roche ainsi que dans le coteau des Chaumes à Nivolas-Vermelle où une unité de traitement des granulats est également dans l'emprise. Le tronçon de ligne nouvelle nécessiterait également la construction de plusieurs ponts, dans la vallée du Bion (pour franchir la Départementale 522) et dans la plaine industrielle de Nivolas-Vermelle. En outre, plus de 5 000 m d'écrans phoniques seront nécessaires entre l'Isle-d'Abeau et Saint-Alban de Roche. Le montant des travaux de ce contournement est estimé à 2 150 millions de francs.
Le même projet prévoit également la construction d'une "déviation longue en ligne nouvelle permettant de court-circuiter le secteur fortement contraint de Saint-André-le-Gaz jusqu'aux abords Rives appelée déviation du Grand-Lemps". Plus loin, entre Beaucroissant et Moirans, des travaux seraient entrepris sur 11 kilomètres pour permettre aux trains de circuler à 220 km/h.
Ces derniers travaux (estimés à 900 millions de francs) exigeraient la construction d'un viaduc de 1 500m et le percement d'un tunnel de 400 m. Ils induiraient également le rétablissement de plusieurs voies routières ainsi que le sacrifice de plusieurs habitations voire de bâtiments industriels et commerciaux situés dans les zones du Plan et de la Piche. La réalisation de ce projet permettrait aux T.G.V. de gagner une vingtaine de minutes sur le trajet Lyon- Grenoble, celui-ci étant ramené à moins d'une heure. Il reste entendu selon la S.N.C.F., que la voie actuelle (via Bourgoin-Jallieu, La Tour-du-Pin, Saint-André le Gaz et Voiron) serait maintenue en l'état et affectée aux transports de marchandises mais aussi à la desserte locale.
Jacques SAVOYE .
Une alternative au T.G. V. Lyon-Turin ?
Le nouveau projet d'une desserte à grande vitesse entre Lyon et Grenoble pourrait répondre à l'une des demandes formulées par la Coordination Ain-Isère-Rhône contre le T.G.V. Lyon-Turin qui souhaite une meilleure utilisation des voies existantes par la mise en oeuvre des trains pendulaires.
Or, dans l'étude présentée, la S.N.C.F. rejette l'idée du train pendulaire qui, en l'état actuel de la technique, exigerait des travaux d'adaptation estimés à 20 millions de francs sans un notable gain de temps (une minute entre Lyon et Saint-André-le-Gaz) puisque, note l'étude, "les vitesses maximales atteintes ne dépasseraient pas les 160 km/h".
Le projet de la S.N.C.F. pourrait être une alternative au T.G.V. Lyon-Turin. On sait que celui-ci est freiné par son financement, en particulier en ce qui concerne le tunnel de 53 kilomètres sous les Alpes. De surcroît, il ne semble plus receuillir l'assentiment des élus grenoblois et du conseil général que le T.G.V.Lyon-Turin laisserait en quelque sorte sur la touche.
Ce nouveau projet pourrait donc recueillir l'assentiment des collectivités dans la mesure où il aurait bien moins d'impact sur l'environnement que le "Lyon-Turin" et solliciterait beaucoup moins les finances publiques.
Le Dauphiné Libéré du 27-11-97