Le Train jaune est prêt
pour l'été:
Confortement du tunnel Sans 2,
travaux de voie de Villefranche à La Tour-de-Carol, reprise
de trois passages à niveau... Profitant d'une interruption
des circulations de dix-sept jours au mois de mai, la ligne du
train jaune se refait une beauté avant d'affronter la déferlante
touristique, en hausse de 25 %. Seul point noir : le train Canari
ne roule toujours qu'à 25 km/h.
Du 3 au 21 mai, la ligne Villefranche-Vernet-les-Bains La-Tour-de-Carol, celle du Train jaune de Cerdagne, a été interrompue pour cause de travaux. Toutes les circulations ont été reportées sur route. Ont ainsi pu être dégagées deux semaines pour que le service Equipement de la SNCF réalise, principalement, le confortement du tunnel Sans 2, en aval immédiat de la gare de Thuès-les-Bains. Cela en prévision d'une saison estivale qui s'annonce chargée.
Cet ouvrage long d'une centaine de mètres, en courbe, se situe à proximité immédiate, mais sur le versant opposé, du gigantesque glissement de terrain qui a interrompu la N 116 dans l'étroite vallée de la Têt, en février dernier. Il était observé avec une attention particulière depuis des années. Exceptées deux voûtes en maçonnerie courant sur une dizaine de mètres de pan et d'autre des portails, il est percé à roche nue, comme de nombreux ouvrages de la ligne. Les schistes friables de cette zone du pied du Canigou causent depuis longtemps du souci aux responsables de l'Équipement. Ceux-ci avaient décidé, dés janvier, de lancer des travaux dans le tunnel Sans 2 avec, au choix, une intervention en mai ou en octobre. Cette seconde hypothèse impliquant, pour des raisons de sécurité, l'interdiction de la traditionnelle mise en service estivale des voitures découvertes, très prisées des touristes, la première solution a été retenue.
Les travaux ont commencé en avril par le transport, de nuit pour ne pas perturber le service, de 450 tonnes de ciment, d'un camion mixte, de compresseurs, de citernes d'eau, de conteneurs à carburant sur le site de la gare de Thuès-les-Bains. Un travail d'autant plus délicat qu'aucun accès routier n'est possible, le bâtiment voyageurs étant perché à flanc de montagne et seulement accessible à pied depuis la vallée et l'établissement thermal qu'il domine. Il a fallu charger les matériaux en gare de Fontpédrouse, à 7 km en amont du site des travaux, sur des wagons plats de l'Équipement tractés par une motrice voyageurs moyennant une mise sous tension nocturne exceptionnelle de la section de ligne. La charge utile maximale des circulations était fixée à 22 tonnes.
Après nettoyage par eau sous haute-pression
de la partie centrale du tunnel, les équipes de Seco &
DG ont projeté les 450 tonnes de ciment spécial
incorporant des fibres métalliques crochetées de
quelques centimètres de longueur.
Profitant de cette interruption de 17 jours, des travaux de voie
ont été réalisés sur l'ensemble de
la ligne : assainissements de réseaux d'évacuation,
élagages et trois reprises de passages à niveaux.
A Saillagouse, 200 m de voie ont été remplacés
et d'importants renouvellements de traverses ont été
réalisés sur les sections Villefranche-Olette et
Montlouis-Fontpédrouse. Enfin, un appareil de dilatation
a été remplacé sur le célèbre
viaduc Gisclard.
La ligne sera donc fin prête pour la saison qui voit s'amplifier année après année un véritable rush estival, courant de juin à septembre.
Avec la nomination d'un responsable commercial
pour l'axe Perpignan - La Tour, en 1997, la SNCF a montré
qu'elle accordait à cette liaison une réelle importance.
Le résultat ne s'est pas fait attendre. Dès l'été
1998, les chiffres de fréquentation des quatre mois estivaux
étaient en hausse de 25 %, avec un chiffre d'affaires gagnant
37 % par apport à l'année précédente.
« Nous sommes restés en état de saturation,
mais avec une desserte optimisée, ce qui a permis ces gains
», note le responsable commercial, Olivier Germain, qui
passe la main dés cette année à Alain Neuvéglise,
après avoir contribué à instaurer une desserte
renforcée en milieu de matinée. « On s'est
aperçu que, l'été, les gens voulaient partir
de Villefranche entre 9 h et 11 h. Alors on a mis en service un
troisième départ dans ce créneau-là
et ça a très bien marché », explique
Olivier Germain.
Alain Neuvéglise entend poursuivre
l'action dynamique de son prédécesseur, en étendant
la diffusion de livrets et dépliants commerciaux de qualité,
mis à jour annuellement et tirés à 200 000
exemplaires, en amplifiant la campagne de communication par voie
d'affichage vers les lieux touristiques, en particulier vers les
plages languedociennes et roussillonnaises, et en renforçant
la présence des offices de tourisme en gare, sur le stand
SNCF. Un troisième établissement sera concerné
: après Villefranche et Font-Romeu, ce sera bientôt
le tour de Montlouis. Les livrets commerciaux reprennent, gare
par gare, toutes les destinations touristiques accessibles à
pied, décuplant les motivations de voyage : boucles de
randonnées, monuments, curiosités, musées.
Le budget communication de la ligne s'élève
à 150 000 francs par an. « L'objectif premier, explique
Alain Neuvéglise, est de permettre une bonne localisation
du Train jaune. » Puis de multiplier les raisons de l'emprunter.
D'où l'importance des partenariats avec les offices de
tourisme. Une diversification de l'offre avec trains spéciaux
est déjà entamée. « En 1998 pour le
feu d'artifice du four solaire de Font-Romeu, nous avons rempli
un train spécial de 150 personnes en le commercialisant
pourtant avec seulement quatre jours d'avance », explique
Olivier Germain. Une initiative qui sera reprise cette année.
Toujours en 1998, le premier « mariage du Train jaune »
a été organisé, avec location par les heureux
époux et leurs familles de deux voitures spéciales
sur une circulation régulière. Des trains loués
par plusieurs groupes sont aussi organisés. Avec un aller-retour
dont le prix se situe entre 15 000 et 20 000 francs (2 286-3 050
euros), le marché du train spécial peut être
porteur.
Cette exploitation touristique du Train jaune ne doit pas faire
oublier sa vocation de service public, insistent les responsables
de la SNCF. Les élèves du lycée climatique
de Font-Romeu ou les militaires de Montlouis sont des clients
réguliers de la ligne.
A La Tour-de-Carol, les correspondances avec les trains de la
ligne de l'Ariège sont nombreuses, surtout pendant les
vacances d'hiver, avec une importante clientèle toulousaine
et parisienne.
Il n'en reste pas moins qu'avec une vitesse commerciale d'environ
25 km/h et de rares pointes à 55 km/h, le Train jaune a
un point faible essentiel : sa voie. Donc son inconfort et la
faiblesse du nombre de rotations possibles. La perspective d'achat
d'un nouveau matériel, dont le cahier des charges est en
cours d'élaboration et pour lequel l'appel d'offres est
prévu avant la fin de l'année, ne peut le faire
oublier, pas plus qu'une alimentation électrique rudimentaire.
Avant l'arrivée des futures automotrices, les cheminots
de la Cerdagne ont, en collaboration avec la région Languedoc-Roussillon,
un autre grand projet : la rénovation des 22 gares de la
ligne. Mais il est encore dans les cartons.
Michel Gabriel LEON LVDR du 26-05-99