Essais concluants pour Innorail, la
filiale de SGTE (groupe Spie) qui commercialise un système
d'alimentation électrique par le sol pour les tramways.
Cette société a en effet procédé à
des expérimentations en vraie
grandeur sur le réseau de Marseille, de nuit. Le procédé
a été validé, et proposé à
la ville de Bordeaux pour son nouveau réseau.
Née en 1996, l'idée consiste à transporter
l'énergie électrique dans un rail positionné
au milieu de la voie, permettant de ce fait d'éliminer
les caténaires dont la présence est gênante
en centre-ville. Ce rail est en réalité composé
d'une succession de modules de 11 m de long, qui comprennent chacun
un segment de rail de 8 m, encadré de deux isolants de
1,50 m. « Il s'agit d'une poutre creuse en matériau
composite, dont la surface est constituée d'une succession
de pistes métalliques et isolantes », explique Olivier
Perraud, directeur général d'lnnorail. « A
l'intérieur de cette poutre, on trouve deux barres en aluminium
qui assurent l'alimentation principale en 750 V, et des alimentations
secondaires en 220 V ».
Ces dernières sont destinées à des pièces
maîtresses du système: des coffrets étanches
de 350 mm de diamètre et de 45 cm de haut, enterrés
tous les 22 m, qui abritent les organes de commutation des segments.
Car l'alimentation du tramway est assurée à son
passage, et à son passage seulement. Ce qui signifie que
le courant est établi à l'arrivée de la rame,
et coupé derrière elle au fur et à mesure
de sa progression, grâce à ces organes. Et aucun
segment conducteur ne peut être mis sous tension s'il n'est
pas entièrement recouvert par la rame.
Un système valable pour tous les matériels roulants
« Les avantages sont nombreux: l'alimentation par le sol
peut être utilisée par tous les types de matériel
roulant, qui doivent simplement être équipés
de patins semblables à ceux des métros à
trois rails, et dotés d'une électronique embarquée
qui annonce la présence de la rame au rail. Cette technique
limite par ailleurs les perturbations électromagnétiques
en réduisant l'écart entre la source et le retour
de courant, et elle supprime les réservations nécessaires
à l'implantation des poteaux de caténaire»,
souligne Olivier Perraud. Le profil mesure 125 mm de large et
140 mm de haut.
Il se pose sur les traverses, sans modification de l'assise de
la plateforme. Innorail estime le prix de son procédé
« dans l'ordre de grandeur d'une ligne aérienne ».
Pour l'entretien du système par le sol, il faut compter
l'usure des pistes métalliques, et le remplacement éventuel
des segments. « Ce n'est pas plus cher que de remplacer
un fil aérien », assure Olivier Perraud.
POUR
RENÊ TUTZAUER Chef de produits tramways et métros
légers d'Alstom
« Résoudre le problème
de la sécurité. »
« Chez Alstom, nous avons inventé un système
alternatif à la batterie : le volant d'inertie.
C'est une plaque métallique qui tourne à plus de
10 000 tours/minute, et qui est alimentée par dessous au
moyen d'une génératrice. Lorsque l'on branche celle-ci,
on ralentit le volant, dont on utilise alors l'énergie
pour « lancer » le tramway.
Très intéressante du point de vue de l'accélération,
cette solution suppose que l'on puisse recharger le volant en
station (20 secondes suffisent).
Deux possibilités s'offrent à nous: l'alimentation
aérienne,à travers un pantographe que l'on lève
à l'arrêt, et l'alimentation par le sol. Reste à
résoudre le problème de la sécurité
électrique dans l'hypothèse d'une recharge en station
par des bornes, et celui de la sécurité physique
dans l'hypothèse d'un troisième rail, notamment
pour les cyclistes, d'autant que l'implantation de ce rail nécessite
le creusement d'une tranchée d'environ 20 cm.
Pour le moment, nous n'avons pas de préférence car
l'adaptation du matériel roulant au mode d'alimentation
reste mineur. Nous avons l'intention de tester le captage au sol
à La Rochelle, où notre véhicule à
plancher intégral et à volant d'inertie démarre
ses premières démonstrations.»
CONTRE
PHILIPPE DALMAS Directeur des équipements ferroviaires de Matra Transport International
« Tenir compte des coûts. »
« La question du mode d'alimentation électrique ne
se pose pas uniquement sur le plan technique, car on peut toujours
tout faire. Je pense qu'il faut plutôt se poser la question
des coûts tant pour la réalisation compte tenu de
la complexité des solutions mises en oeuvre - que pour
la maintenance, puisque la question de la tenue dans le temps
n'est pas facile à résoudre. or, le captage de surface
est une solution onéreuse de ce point de vue-là,
et c'est une technique qui risque d'être vite dépassée.
Il existe en revanche des solutions embarquées qui voient
le jour, et qui pourraient très vite connaître leurs
premières applications dans les transports publics.
ll s'agit de combiner des batteries qui progressent en termes
de capacité (fourniture d'énergie) avec des supercapacités
(fourniture de puissance instantanée): Les productions
industrielles ont commencé. La supercapacité permet
une recharge en
dix secondes, alors que le temps d'arrêt moyen en station
est de vingt secondes, ce qui rend l'alimentation"transparente"
pour la politique commerciale. Enfin, à terme, les véhicules
seront équipés de piles à combustible.
D'un point de vue général, nous allons de toute
évidence vers des modes d'alimentation mixtes trolley/diesel
, électrique, caténaires/pas de caténaires,
batteries, supercapacités. L'objectif étant de ne
plus avoir de fils suspendus, notamment dans les quartiers «
sensibles » des villes, et de réduire au maximum
les pollutions sonores et atmosphériques.
Les nouveaux moteurs diesel polluent d'ailleurs pratiquement cinq
fois moins que les diesel actuels.»
Le Moniteur du BTP N° 5008 nov 99